L’âme

Alors que je débute la lecture du célèbre roman de Gabriel Garcia Marquez « cent ans de solitude », mon nouveau stage commence, un signe ? Peut-être. Je découvre surtout un nouvel exercice, celui de la psychiatrie ambulatoire.

« Bienvenue dans l’unité de psychiatrie et addictologie ambulatoire » déclare le chef de clinique en nous accueillant. Quatre vieux semestres, quatre « bourlingueurs » de la psychiatrie, quatre bureaux, autant de lignes de consultations et de groupes thérapeutiques à animer pour les six prochains mois. La fine équipe se met en branle, certains s’agitent, d’autres se coordonnent et la machine s’élance, les rendez-vous s’enchainent.

Si, j’ai déjà pu avoir la chance de conduire une petite activité de consultation en CMP, en addictologie et en troubles alimentaires, la majeure partie des stages de l’internat se déroule dans les services hospitaliers, « au lit du malade » comme se plaisent à le dire nos superviseurs. Pourtant, une fois la thèse rédigée, la tendance s’inverse : le chef quitte peu à peu « la salle ». Il compte alors sur les internes : veille sur eux, prodigue ses conseils, surveille le bon déroulé de cette célèbre cérémonie hospitalière mais investi de plus en plus ses consultations. Et c’est, somme toute, normal puisque la majorité des patients nécessite non pas une hospitalisation mais une prise en charge ambulatoire. Le ministère de la solidarité et de la santé retrouve par exemple qu’en 2018, 84% des patients relevant de la psychiatrie, ont bénéficié d’une prise en charge ambulatoire.

Aussi, quand l’occasion s’est présentée aux choix de stage, j’ai sauté sur ce service de psychothérapie ambulatoire, une opportunité de véritablement se former à l’exercice de la consultation. Seulement, de nouvelles questions prennent forment dans mon crâne.

Qu’est-ce que la psychothérapie ?

Le mot « psychothérapie » apparait pour la première fois en français en 1899 dans le dictionnaire historique de la langue française [1]. Auparavant les médecins parlaient de « traitement psychique », de « cure », de « traitement moral ». Étymologiquement, Psychothérapie dérive de Psukhé, l’âme et Therapia, traitement, dans ce sens, le collège de psychiatrie définit la psychothérapie comme « toute utilisation de moyen psychologiques pour traiter un trouble psychiatrique ou tout autre problème entrainant une difficulté ».

En 1886, dans l’ouvrage « De la suggestion et de ses applications à la thérapeutique » – qui inspirera d’ailleurs « la guérison par l’esprit » à Stephan Zweig – le neurologue français Hyppolyte Bernheim décrit les premiers traitements psychothérapeutiques : le mesmérisme et le magnétisme animal, l’hypnose de Charcot, les premières approches analytiques de Freud.

Définir ce qu’est la psychothérapie est un exercice difficile et il est parfois plus facile de dire ce qu’elle n’est pas. Elle n’a pas par exemple pour objectif la quête du bonheur, la sagesse ou encore l’exploration de la créativité ; ces thèmes appartenant au registre du développement personnel.

Finalement, toutes ses méthodes ont un point en commun, écouter et considérer le patient, ce sont des « approches centrées sur la personne » selon les termes du psychiatre Carl Rogers.

Comment choisir sa psychothérapie ?

Si la première réponse qui vient à l’esprit est « la plus efficace », il convient de se demander comment définir l’efficacité, vaste débat depuis le rapport en 2004 de l’ISERM, faisant encore polémique actuellement. Jean Cottraux propose ainsi humblement qu’une psychothérapie efficace entraine « des changements positifs dans trois domaines : la souffrance psychique ou physique, la personnalité et la qualité de vie » [2].

J’ajouterai qu’une donnée à prendre vraiment en compte est la formation du psychothérapeute. Dans une époque, où le charlatanisme flattant nos croyances est en vogue et où il est facile d’abuser les personnes en souffrance psychique, il convient de s’assurer de la qualité de formation de son praticien. C’est d’ailleurs selon de nombreuses méta-analyse le principale facteur de la mise en place de  cette fameuse « Alliance thérapeutique » [3].

Mais alors, ou se former ?

Si, à notre façon, nous pratiquons tous une certaine psychothérapie de soutient : en cherchant la bonne formulation, en soulignant les émotions de nos patients, en partageant nos ressentis ; il arrive un moment où avoir à sa disposition des outils adaptés permet d’accompagner dans leurs réflexions les patients.

Il existe autant de psychothérapie que de champs de santé mentale : EMDR, Hypnose, TCC, psychodynamie, systémique etc… Paris recèle de centres de formations : AFTCC, APRFT, SPP… Faut-il encore trouver chaussure à son pied.

Passionné par l’adulte jeune, l’addictologie et les théories de Bowlby sur l’attachement, c’est tout naturellement que je me suis intéressé à la thérapie interpersonnelle (sujet que je développerai dans un prochain article) et que j’ai décidé de me former via l’association de l’IFTIP.

Voilà le temps de se former, de découvrir et pratiquer. J’ouvre le livre de Nicolas Neveux « Prendre en charge la dépression avec la thérapie interpersonnelle » et j’y découvre la clinique des mots, réfléchissant déjà à comment mettre en place les techniques psychothérapeutiques.

Références

[1]  Rey A, editor. Dictionnaire culturel en langue française: présentant plus de 70 000 mots du français classique, moderne et très contemporain, avec leur origine, leurs sens et leurs emplois clairement définis, illustrés de nombreuses citations littéraires, en exemple de bon usage, de beau style, de pensée et de poésie. Paris: Le Robert; 2005.

[2]  Cottraux J. Introduction. Chacun cherche son psy. Choisir Une Psychothérapie Effic., Odile Jacob; 2011, p. 7–8.

[3]  Cuijpers P, Noma H, Karyotaki E, Cipriani A, Furukawa TA. Effectiveness and Acceptability of Cognitive Behavior Therapy Delivery Formats in Adults With Depression: A Network Meta-analysis. JAMA Psychiatry 2019;76:700–7. https://doi.org/10.1001/jamapsychiatry.2019.0268.

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