Le congrès

Métro porte Maillot, direction le parvis du Palais des Congrès. Devant, un de mes amis m’attend, arborant fièrement son badge autour du cou. Valisettes et attaché-cases à la main des centaines de médecins affluent. Ils discutent, rient et partagent leurs impressions.

Pour certains, c’est notre premier congrès, on nous reconnait à nos yeux grands ouverts, à notre émerveillement constant.
Pour d’autre, c’est un rendez-vous habituel, ils se dirigent déjà vers les vestiaires avant d’investir le stand de café.

*

Je retrouve mes co-internes. Chacun a planifié sa journée.
Ce 17e Congrès de l’encéphale « l’enseignement du réel » va commencer par un focus « Regard renouvelé sur l’hypnose ».

Carnet de note sur les genoux, j’écoute l’introduction du Docteur Philippe Aïm sur les principes de l’hypnose médicale. Il évoque la principale contre-indication : la psychose aigue, développe les principes de transe et de relation hypnotique, insiste également sur l’importance de hiérarchiser ses perceptions en hypnose et n’oublie pas de nous alerter sur les dérives de cette pratique.

Intervient ensuite le Docteur Mengin de Strasbourg qui rapproche hypnose et neuroscience. Il définit la suggestibilité hypnotique en utilisant l’échelle de Stanford, précise grâce à l’IRM fonctionnelle les zones anatomiques affectées et termine son exposé en évoquant la perte d’agentivité, autrement dit : la perte partielle du contrôle et de la régulation de l’action des patients sous hypnose.

Enfin, le Docteur Coraline Hingray termine par l’application de l’hypnose aux traumatismes psychiques. De la dissociation traumatique à l’amnésie en passant par le phénomène de personnalités multiples – caricaturé dans le film Split – elle expose les différents angles thérapeutiques.

*

Vient alors le moment de flâner parmi les stands du « village de l’innovation », découvrir grâce à la réalité virtuelle la vision du monde d’un patient schizophrène, échanger avec les membres des associations d’internes en psychiatrie.

*

Après un rapide repas, j’assiste à la conférence « je suis gamer, dois-je soigner ? ».
Julien Bossu partage son témoignage poignant sur son vécu d’addiction aux jeux vidéo, où, comment après une rupture sentimentale il s’est retrouvé à jouer plus de 20h par jours à la console.

Farid Ben Salem présente ensuite le processus de création d’un jeu vidéo, explique comment les entreprises actuelles augmentent sensiblement la durée de vie de ces jeux pour les rendre « encore plus addictifs », mais rassure en nous démontrant en quoi ces mondes virtuels sont aussi des lieux de créativité.

Andréas Honnet, alias Sardoche, célèbre streamer veut quant à lui veut aller au-delà des préjugées, il arrive en effet à vivre des jeux vidéo. A la manière d’un psychanalyste, il désigne son égo et une certaine faille narcissique comme l’origine de son addiction aux jeux.

L’addictologue Bruno Rocher conclut par son expertise médicale du sujet : les nouveaux critères CIM-11 de l’addiction comportementale, aux projets thérapeutiques qui se mettent en place.

*

Direction le célèbre amphithéâtre bleu pour entendre le fabuleux discours d’ouverture de l’avocat et bâtonnier du Barreau de Paris, Christian Charriere-Bournazel sur « éloquence et vérité » jonglant entre Paul Valery et Cicéron, entre vérité et justice, il dira du réel – Thème de ce congrès – que « l’éloquence en fait un objet d’art ».

*

La conférence « Le sexe pour les nuls » animée par Catherine Solano attire également les foules et fait salle pleine. De l’anéjaculation à l’orgasme féminin, l’experte présente ainsi les bases de la sexologie. Elle explique ses méthodes de reformulation passive, rappelle à tous l’anatomie du clitoris et donne des pistes diagnostiques : la pornographie et les circuits neurologiques de l’excitation, les médicaments hormonaux, le tabac…

*

Reprenant le titre d’une des présentations de la journée « Votre cerveau vous ment », Michel Fages, mentaliste et prestidigitateur ouvre la Battle des jeunes cliniciens par de nombreux tours de magie et manipulations mentales, comme ces cinq jeunes psychiatres « hypnotisés » sous nos yeux.

Sur la musique du film de Steven Spielberg s’ouvre la Battle « Psychiatric Parc », 30 minutes de questions de sémiologie, d’histoire et d’humour pour départager six candidats, l’heureux vainqueur repartant avec une Apple Watch.

*

Pour clôturer cette première journée, la PEPS – association des internes de psychiatrie de Paris – a organisé une petite soirée dans un Pub. Autour d’une bière, on débriefe entre internes sur ce premier congrès, on partage nos expériences.

*

Le lendemain, c’est à la « session innovation » que je me rends. Stéphane Mallard, « évangéliste du digital » démarre en nous parlant d’intelligence artificielle, de disruption, d’humanité augmentée. Il dépeint un futur proche où – Comme Joaquin Phénix dans le film Her – chacun de nous aura un assistant personnalisé pour l’accompagner, un majordome numérique chargé de veiller sur nous. Il définit les notions de programmation, de machine learning, évoquant les réseaux de neurone et la plasticité des nouvelles synapses informatiques.
Six « Start up » défilent ensuite, présentant chacune son projet. Le futur est en marche !

*

La matinée et ce congrès se terminent ensuite pour moi par le passage obligé devant les posters. J’y déniche des études sur l’empathie des étudiants en médecine, des outils d’aide à la prescription pour les troubles du comportement, des revues systématiques de littératures.

Ces deux jours furent donc une belle initiation au monde scientifique de la psychiatrie. Des souvenirs qui resteront et des idées à developper.

Merci au comité d’organisation, et à l’année prochaine.

1 comment

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *